La
National Security Agency
Avec "Ennemi d'État", le grand
public a découvert les incroyables capacités de surveillance
et d'espionnage dont dispose ce service de renseignement américain
: antennes, capteurs, satellites... qui permettent de suivre
le trajet d'un véhicule, où qu'il se trouve à la surface de
la Terre, depuis Fort Meade, le quartier général de l'agence.
Là,
quelque vingt mille employés, « analystes, ingénieurs, physiciens,
mathématiciens, linguistes, informaticiens, chercheurs, spécialistes
des relations avec la clientèle, officiers de sécurité, experts
en flux de données, gérants, assistants administratifs et
employés, pour n'en citer que quelques-uns », sont chargés
de dépouiller les conversations téléphoniques, dans le but
« d'informer les responsables et d'assurer la sécurité du
pays ».
Établie
en 1952 par une directive
secrète du président Harry Truman, la NSA est chargée du contre-espionnage,
de la protection des communications gouvernementales et militaires,
mais également d'espionnage : elle est allée jusqu'à infiltrer
la Commission spéciale des Nations unies en Irak. Elle se
consacre aussi à la recherche et au développement tous azimuts.
Pourtant, son activité "officielle" est la cryptologie (c'est
d'ailleurs la seule activité qui ressort de la lecture de
leur site): ils emploient les meilleurs cryptanalystes du
monde et disposent d'ordinateurs capables de "casser" n'importe
quel codage.
L'organigramme
de l'agence montre que ses services couvrent tout le champ
des technologies de l'information militaire et civile : cryptologie
(des algorithmes mathématiques aux super- ordinateurs), interception
des signaux électromagnétiques, sécurité des réseaux informatiques,
satellites d'observation... jusqu'à une énigmatique division
« combat, nucléaire et espace».
Les
capacités d'interceptions
L'agence
est la figure de proue d'un pacte de collecte d'informations
entre les États-Unis et les services de renseignements
du Royaume-Uni, du Canada, de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande.
Ce pacte, dénommé « Ukusa », date de 1947. Ses attributs sont
montés en puissance à partir des années 70 et 80 , quand fut
mis en place le réseau « Échelon».
Elle
dispose de plusieurs dizaines de stations d'écoute des communications
téléphoniques en Angleterre, Nouvelle Zélande, Japon, Australie,
... Elle dispose aussi des satellites (Mercury, Mentor, Trompet)
qui "filtrent" toutes les communications radioélectriques
(radio, télévision, mais aussi stations relais des téléphones
mobiles, micro-ondes, ...). Quand les câbles n'étaient
encore qu'analogiques, la NSA aurait eu un robot sous-marin
(à - 5000 m) qui posait des bretelles sur les lignes sous-marines,
et qui reémettait vers une station au sol, en Grande Bretagne.
Les fibres optiques seraient actuellement espionnées grâce
à un procédé tenu secret. Enfin on peut soupçonner une collaboration
étroite avec les compagnies de téléphone. Durant les années
1950/60 (opération Shamrock),
la NSA - dont personne ne soupçonnait alors l'existence -
avait demandé aux compagnies de télégraphie de l'époque de
lui remettre une copie de chaque communication qui entrait
ou sortait des États-Unis.
Les
écoutes sont effectuées sur certains "points sensibles" (ambassades,
ministères). Mais ils disposent aussi de systèmes de reconnaissance
vocale. Ainsi de puissants ordinateurs CRAY
construits "sur mesure" permettent de reconnaître des mots
clefs et/ou des voix dans certaines conversations. Après traitement,
et sélection, seules 10.000 a 15.000 communications seraient
vraiment exploitées chaque jour. Leurs satellites espions
leur permettent de détecter les émissions infrarouges
et ainsi repérer les usines de production d'armes bactériologiques,
chimiques, les stocks d'armes lourdes ...
Dans
le monde entier, « toutes les communications par courrier
électronique, téléphone et fax sont régulièrement interceptées
» par Échelon, dont les ordinateurs entraient de la
masse d'informations les messages contenant les mots-clés
sensibles.
C'est
à partir de ses communications téléphoniques que le dirigeant
kurde Abdullah Öçalan aurait été « pisté » durant son errance
par les services secrets américains, pour le compte de la
Turquie.
Documents
officiels
La
directive 9 du NSCID
Dans
la directive 9 du National Security Council Intelligence du
10 mars 1950, la notion de communication extérieure
est définie au sens du COMINT; c'est ainsi qu'il faut
entendre par communication extérieure toute communication
gouvernementale au sens large (pas uniquement militaire),
ainsi que toute autre communication, pouvant contenir des
informations d'intérêt militaire, politique,
scientifique ou économique.
La
directive NSCID 9 rév. du 29.12.1952 stipule que le
FBI est seul responsable pour la sécurité intérieure.
La
directive du DoD du 23 décembre 1971 concernant la
NSA et le Central Security Service (CSS) définit comme
suit ce concept pour la NSA:
-
la NSA est un service distinct au sein du ministère
de la défense, qui est placé sous la direction
du ministère de la défense;
-
la NSA assure, d'une part, la mission SIGINT des Etats-Unis
et met, d'autre part, à la disposition de tous les
ministères et services des systèmes de communications
sûrs;
-
l'activité SIGINT de la NSA ne s'étend pas
à la production et à la diffusion d'informations
déjà traitées. Cette tâche est
du ressort d'aures ministères et services.
Par aiileurs,
la directive du DoD de 1991 présente, dans les grandes
lignes, la structure de la NSA et celle du CSS.
Le
directeur de la NSA s'explique
Dans
une déclaration qu'il a faite le 12 avril 2000 devant
la commission d'enquête permanente "Renseignement"
de la chambre des représentants, Hayden, directeur
de la NSA, décrit comme suit les missions de la NSA:
-
la surveillance électronique sert à rassembler
des communications extérieures à l'intention
des militaires et responsables politiques;
-
la NSA fournit aux consommateurs gouvernnementaux américains
des renseignements sur le terrorisme international, la drogue
et la prolifération des armements;
-
la NSA n'a pas pour mission de collecter toutes les communications
électroniques;
-
la NSA ne peut transmettre des informations qu'à
des destinataires autorisés par le gouvernement;
elle ne peut en transmettre directement aux entreprises
américaines.
Les
stations d'interception
Yakima
La
station a été créée dans les années
1970 en même temps que la première génération
de satelllites. Depuis 1995, l'Air Intelligence Agency
est sur place, avec le 544th Intelligence Group (Detachment
4). Le Naval Security Group y est également
stationné.
La
station compte six antennes satellitaires de grande dimension
dont les sources ne permettent pas de connaître la dimension.
Selon Hager, ce sont des antennes satellitaires de grande
dimension et elles sont orientées sur des satellites
Intelsat en orbite au-dessus du Pacifique (deux antennes satelliltaires)
et sur des satellites Intelsat en orbite au-dessus de l'Atlantique;
des antennes sont orientées sur les satellites Inmarsat
2.
Le
fait que Yakima a été créée en
même temps que la première génération
de satellites Intelsat, d'une part, et la description générale
des missions du 544 th Intelligence Group, d'autre part, donnent
à penser que Yakima joue un rôle dans la surveillance
globale des communications. Autre indice: Yakima est proche
d'une station de réception de satelllites, située
à 100 miles au nord.
Sugar
Grove
Sugar
Grove a été créée en même
temps qu'était mise en service la deuxième génération
de satellites Intelsat, à la fin des années
70. Y sont stationnés le NAVSECGRU ainsi que l'AIA,
avec le 544 th Intelligence Group (Detachment 3).
Selon
plusieurs auteurs, la station compte dix antennes satellitaires,
dont trois ont plus de 18 mètres (18,2 mètres,
32,3 mètres et 46 mètres) et conviennent donc
clairement pour écouter des satellites de communication.
À
la station, une des missions du Detachment 3 du 544 th IG
est de fournir un "intelligence support" pour la
collecte, par les stations de la Navy, d'informations provenant
de satellites de communication 37 . De plus, Sugar Grove est
située à proximité (60 miles) de la station
de réception de satellites Etam.
Sabana
Seca (Puerto Rico)
En
1952, le NAVSECGRU fut stationné à Sabana Seca.
Depuis 1995, s'y trouve aussi la AIA, avec le 544 th IG (Detachment
2). La station compte au moins une antenne satellitaire d'un
diamètre de 32 mètres et quatre autres antennes
satellitaires de petite dimension.
Officiellement,
les missions de la station sont: traitement des communications
par satellite ("performing satellite communication processing"),
"cryptologic and communications service" et appui
à des missions de la Navy et du DoD (notamment, collecte
d'informations COMSAT (d'après le 544 th IG)).
À
l'avenir, Sabana Seca doit devenir la première station
d'analyse et de traitement de communications par satellite.
Guam
(Pacifique)
Guam
existe depuis 1898. Elle abrite aujourd'hui une Naval Computer
and Telecommunication Station, où sont stationnés
le 544 th IG de la AIA ainsi que des soldats de la Navy. La
station compte au moins deux antennes satellitaires, de dimension
inconnue. Aussi la fonction de Guam demeure-t-elle peu claire.
Kunia
(Hawaï)
Depuis
1993, cette station est un Regional Security Operation
Center (RSOC), desservi par le NAVSECGRU et l'AIA. Elle
a notamment pour missions la mise à disposition d'informations
et de communications, ainsi que le soutien cryptologique.
La fonction de Kunia demeure peu claire.
Buckley
field (Colorado)
La
station a été créée en 1972. Y
sont stationnés le 544th IG (Det. 45). La station compte
environ cinq antennes satellitaires, dont quatre d'un diamètre
d'environ 20 mètres.Officiellement, la station a pour
mission de collecter, d'exploiter et d'analyser des données
obtenues grâce à des satellites SIGINT concernant
les phénomènes nucléaires.
Medina
Annex, (Texas)
Tout
comme Kunia, Medina créée en 1993
est un Regional Security Operation Center, qui est desservi
par le NAVSECGRU et des unités de l'AIA. Ses missions
concernent les Caraïbes.
Fort
Gordon
Fort
Gordon est aussi un Regional Security Operation Center. Il
est desservi par l'INSCOM et l'AIA (702 nd IG, 721 st IB,
202 nd IB, 31 st IS). On n'est pas sûr de ses missions.
Fort
Mead
Fort
Mead est le quartier général de la NSA.
Le
pouvoir de la NSA
-
Le
6 septembre 1960, deux déserteurs de la NSA révélèrent
au cours d'une conférence de presse l'étendue
mondiale des activités de la NSA.
«
Nous savons pour avoir travaillé à la NSA
[que] les États-Unis espionnent les communications
secrètes de plus de quarante nations, y compris
celles de nos propres alliés
Les communications
classiques tout autant que codées sont surveillées,
et cela concerne pratiquement toutes les nations du monde,
y compris celles dans lesquelles sont implantées
les stations d'écoute. »
-
Quinze
ans plus tard, le sénateur américain Frank
Church émit un sinistre avertissement lorsque commencèrent
les enquêtes sur la NSA qui suivirent le scandale
du Watergate. Le comité Church dévoila alors
que la NSA avait mis en place une "liste de surveillance",
afin d'intercepter les communications internationales
de milliers d'Américains, notamment celles d'opposants
notoires à la guerre du Vietnam.
«
Je sais qu'il y a ici capacité à rendre
la tyrannie totale
nous devons nous assurer que
cette agence
travaille dans le respect des lois
et sous un contrôle adéquat, afin que nous
ne traversions jamais cet abysse. »
Une
employée de la NSA parle
Une
ancienne employée de Lockheed Martin a reconnu avoir
travaillé sur le projet pour le compte de la NSA, dans
un laboratoire informatique de Sunnyvale (Californie) puis
sur le site de Menwith Hill (Royaume-Uni). Affectée
à Echelon durant les années 70 et jusqu'au milieu
des années 80, elle affirme qu'Echelon était
déjà "grand et sophistiqué".
"Il m'est impossible d'imaginer sa puissance actuelle",
ajoute-t-elle.
Interrogée
sur le nom du projet, elle répond qu'Echelon est uniquement
le réseau informatique sur lequel fonctionnent les
logiciels, qu'elle nomme SilkWorth et Sire. Toujours tenue
au secret bien qu'ayant été licenciée,
elle refuse de donner des précisions sur son fonctionnement.
Elle affirme en revanche qu'il s'entoure de mouvements financiers
obscurs entre la NSA et ses sous-traitants.
Elle
précise également qu' Echelon se focalise sur
une "cible" donnée et intercepte toutes les
communications qui en émanent.
echelon-online@fr.st
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