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AVERTISSEMENT

Le document principal vient du site du Sénat. La revue de prsse qui suit est indiquée à titre documentaire et les sources citées au cas par cas.

 

Société Gemplus-SA et avenir en France des technologies de cryptographie et des cartes à puce

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N° 261

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2002-2003

Rattaché pour ordre au procès-verbal de la séance du 10 avril 2003

Enregistré à la Présidence du Sénat le 16 avril 2003

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

tendant à la création d'une commission d'enquête sur la gestion depuis 1998 de la société Gemplus-Sa et sur l'avenir de la maîtrise et du développement en France des technologies de la cryptographie et des cartes à puce après la prise de contrôle de cette entreprise par des fonds d'investissement américains soupçonnés d'être étroitement liés à la CIA et à la NSA,

PRÉSENTÉE

par Mme Marie-Claude BEAUDEAU, MM. Robert BRET, François AUTAIN, Jean-Yves AUTEXIER, Mme Marie-France BEAUFILS, M. Pierre BIARNÈS, Mmes Danielle BIDARD-REYDET, Nicole BORVO, M. Yves COQUELLE, Mmes Annie DAVID, Michelle DEMESSINE, Évelyne DIDIER, MM. Guy FISCHER, Thierry FOUCAUD, Gérard LE CAM, Paul LORIDANT, Mmes Hélène LUC, Josiane MATHON, MM. Roland MUZEAU, Jack RALITE, Ivan RENAR, Mme Odette TERRADE et M. Paul VERGES,

Sénateurs.

(Renvoyée à la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation, et pour avis à la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale en application de l'article 11, alinéa I du Règlement).

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La société d'origine française Gemplus, premier fabricant mondial de cartes à puce, connaît d'importantes difficultés économiques depuis plusieurs années.

Les plans « sociaux » se succèdent. En décembre 2002, 1 000 suppressions d'emplois ont été annoncées dont 483 sur les sites de Géménos et de la Ciotat. En 2001, 1 200 emplois avaient déjà été supprimés dont 400 en France avec la fermeture du site de Sarcelles. Il est question d'un troisième plan de suppression de 320 emplois.

D'importantes restructurations, réorganisations de filiales au plan international sont en cours. D'importantes délocalisations d'activités seraient envisagées. La perspective de démantèlement de l'entreprise, en tout cas de son implantation française d'origine, aujourd'hui regroupée dans Gemplus-SA, se précise.

Certains syndicalistes alertent sur le risque d'un scénario comparable à Metaleurop.

En effet, par-delà une dégradation conjoncturelle de l'environnement économique de l'entreprise, beaucoup d'éléments portent à croire que la situation actuelle de Gemplus résulte de graves malversations de la part des dirigeants et de certains actionnaires récents.

Les montages financiers et les restructurations capitalistiques d'une complexité inextricable se sont multipliés depuis 1999. Les législations fiscales et commerciales françaises ont été contournées notamment via des pays assimilables à des paradis fiscaux.

Citons entre autres des transferts de brevets vers des filiales étrangères à des fins d'évasion fiscale, l'utilisation d'une filiale basée à Gibraltar pour octroyer des droits de vote au Conseil d'administration puis d'importantes plus-values à deux dirigeants dont le fondateur Marc Lassus, le transfert du siège de la société en 1999 au Luxembourg.

Aujourd'hui, une opération comptable visant à faire endosser des dettes à ce qui est devenu la filiale française Gemplus-SA au bénéfice de la filiale américaine Gemplus-Corporation suscite les plus grandes inquiétudes.

Le caractère douteux de cette gestion, son opacité totale ont motivé une démarche du comité d'entreprise auprès du Tribunal de commerce de Marseille demandant l'assignation de la direction de Gemplus et une expertise de gestion. Le 2 avril 2003, ce tribunal a désigné deux experts-comptables chargés de rendre un rapport sur les opérations de gestion réalisées au cours des cinq dernières années.

Les auteurs de la résolution estiment nécessaire, parallèlement, la création d'une commission d'enquête parlementaire sur la gestion passée et présente de Gemplus-SA, malheureusement cas d'école probable de nouvelles formes, mondialisées, de délinquance financière.

Ils tiennent également à rappeler que Gemplus, à partir de sa création en 1988, a bénéficié d'aides publiques très conséquentes sous forme notamment d'exonérations d'impôt sur les bénéfices en contrepartie de son installation dans des zones de reconversion d'emplois, de crédits d'impôts divers comme de cession de terrains au franc symbolique.

Les auteurs de la résolution attirent par ailleurs l'attention sur les graves dangers d'évasion technologique qui constituent probablement la toile de fond de l'affaire Gemplus.

Des soupçons plus que sérieux sont, en effet, autorisés quant aux intentions du Fonds de pension américain, Texas Pacific Group (TPG), qui a pris le contrôle de Gemplus et du PDG, Alex MANDL, dont les liens avec la CIA, via la société InQtel sont avérés.

En tout état de cause, les menaces pesant sur Gemplus en France mettent en cause l'avenir de l'industrie française de la cryptologie et des cartes à puce, son développement ainsi que le maintien de l'avance technologique française.

Les auteurs de la résolution font remarquer que ces technologies ouvrent des possibilités d'application dans de multiples domaines notamment en matière de sécurisation de documents, comme les cartes d'identité, les comptes bancaires... en particulier dans le domaine stratégique du renseignement militaire.

Ce dernier élément pourrait expliquer, encore davantage avec le renforcement de la doctrine de sécurité économique des États-Unis après les attentats du 11 septembre 2001, une convoitise américaine sur Gemplus.

En conséquence, il vous est soumis, Mesdames, Messieurs, la proposition de résolution suivante.

* *

*

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Article unique

En application de l'article 11 du Règlement du Sénat, il est créé une commission d'enquête de vingt-et-un membres chargée d'enquêter sur les opérations de gestion de l'entreprise Gemplus-SA au cours des cinq derniers exercices fiscaux, sur l'utilisation de fonds publics par cette entreprise, ainsi que sur l'avenir de la maîtrise et du développement en France des technologies de la cryptographie et des cartes à puce après la prise de contrôle de cette entreprise par des fonds d'investissement américains soupçonnés d'être étroitement liés à la CIA et à la NSA.

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Les sénateurs communistes demandent une enquête parlementaire sur Gemplus

La nouvelle direction du fleuron français de la carte à puce soupçonnée de liens avec la CIA et la NSA

Le groupe des sénateurs communistes a demandé, le 16 avril dernier, l'ouverture d'une enquête parlementaire sur l'avenir de la société française Gemplus, premier fabriquant mondial de cartes à puce, après sa prise de contrôle par des fonds d'investissement américains soupçonnés de liens avec la NSA et la CIA.

Gemplus est dirigée, depuis août 2002, par Alex Mandl, un Américain "dont les liens avec la CIA sont avérés", accusent les élus communistes. Mandl est en effet administrateur d'In-Q-Tel, un fond d'investissement privé intégralement financé par la CIA, créé en 1999.

"Convoitise américaine"

Pour étayer sa requête, la sénatrice PC Marie-Claude Beaudeau, à l'origine de la demande d'enquête, souligne que les technologies dont dispose Gemplus "ouvrent des possibilités d'application (...) en matière de sécurisation de documents - comme les cartes d'identité et les comptes bancaires - dans le domaine stratégique du renseignement militaire".

Des compétences qui, aux termes de la demande d'ouverture d'enquête parlementaire, pourraient expliquer "une convoitise américaine sur Gemplus" a fortiori "avec le renforcement de la doctrine de sécurité économique des Etats-Unis après les attentats du 11 septembre 2001".

Alex Mandl a été nommé à la direction de Gemplus après le rachat de 26 % des parts de la société en 2000 par le fond de pension américain Texas Pacific Group, moyennant un investissement de 558 millions de dollars.

Depuis, la nouvelle direction a mis en place deux plans sociaux qui ont abouti à la suppression de 2200 emplois, dont plus de 800 en France. Un troisième plan serait en route, prévoyant 320 nouveaux licenciements.

Les sénateurs communistes s'élèvent contre "le caractère douteux de la gestion [de Gemplus]". Ils rappellent que le comité d'entreprise de la société a récemment demandé une expertise de gestion au tribunal de commerce de Marseille.

Le 2 avril dernier, cette juridiction a désigné deux experts-comptables qui devront rendre un rapport sur les opérations de gestions réalisées au cours des cinq dernières années.

Marie-Claude Beaudeau avait déjà plusieurs fois attiré l'attention des sénateurs sur les allégations d'évasion fiscale attribuées à la société Gemplus.

Source: Transfert (24/04/2003)

 

Affaire Gemplus : un pillage technologique ?

Ce serait la main du "capitalisme sauvage" plus que le gant des services secrets

Marie-Claude Beaudeau, sénatrice du Parti communiste, a récemment demandé l'ouverture d'une enquête parlementaire sur l'avenir de Gemplus, le fleuron technologique français, leader mondial de la carte à puce. (voir notre article). Axel Mandl, le Chief Executive Officer (PDG) de Gemplus International, ayant des relations étroites avec le monde du renseignement américain, la sénatrice, comme d'autres, s'inquiète d'une éventuelle perte de contrôle sur "les brevets français". Mais le coeur de "l'affaire Gemplus" semble plus à chercher du côté des suppressions d'emploi et de l'évasion fiscale.

"Tout cela a commencé avec les plans de licenciements. C'est comme cela que nous avons été amenés à nous pencher sur l'aspect fuite de technologie", explique la sénatrice communiste.

Gemplus, dont le fonds d'investissement américain Texas Pacific Group a pris le contrôle en 2000, a mis en place deux plans sociaux (2200 emplois, dont 800 en France). Un troisième plan serait en route, prévoyant 320 nouveaux licenciements.

Depuis août 2002 le leader mondial de la carte à puces est dirigé par Alex Mandl, qui est aussi administrateur d'In-Q-Tel, un fonds d'investissement privé intégralement financé par la CIA.

Peu de brevets stratéqiques

Interrogé sur le risque d'une fuite des brevets, un observateur du marché, qui requiert l'anonymat, reste prudent : "La démarche souverainiste m'amuse un peu. Il faut savoir que Gemplus produit bien plus de cartes bas de gamme comme des cartes téléphoniques ou des cartes SIM pour les portables que de cartes hyper sécurisées. De plus, bon nombre de brevets importants étaient aux mains de Bull CP8 et non pas de Gemplus."

Par contre, au sujet des soupçons d'irrégularités dans la gestion de Gemplus, l'observateur affirme : "Tout le monde sait qu'il y a eu des malversations". Marie-Claude Beaudeau avait déjà plusieurs fois attiré l'attention des sénateurs sur les allégations d'évasion fiscale attribuées à la société Gemplus.

Pour notre interlocuteur, l'affaire Gemplus serait l'illustration de dérives classiques, plutôt qu'une mise en cause directe de l'indépendance technologique de la France : "Soyons pragmatiques... Tout cela n'est qu'une bête application du capitalisme sauvage : une boîte fait des erreurs de gestion ou des malversations, il y a de l'évasion fiscale -pardon, de l'optimisation fiscale-, elle périclite. Il y a des plans de licenciements, une reprise par une société étrangère. Rien que de très banal... On peut y ajouter le fait que la technologie s'envole vers d'autres cieux, mais je ne suis pas certain que cela soit le plus important."

Manipulation à l'ancienne

Déjà en 2002, peu avant le Conseil d'administration qui avait marqué le départ du fondateur Marc Lassus, quelques personnes avaient volontairement poussé des journalistes à se focaliser sur le problème des brevets. Cette tentative de manipulation rappelle aux spécialistes la Maskirovka, une technique similaire chère aux employés des services soviétiques du KGB, qui consiste à créer un écran de fumée pour attirer l'attention et servir de paravent à une autre action. Aujourd'hui, on évoque une main-mise de la CIA et de la NSA, les deux principales agences de renseignement américaines.

Il existe un précédent : Certplus, le leader français de la certification, racheté par Verisign, un grand groupe lui aussi proche des services secrets américains. Mais là encore, Certplus était sur un marché, l'authentification des parties dans un environnement électronique (notamment pour la conclusion de contrats en ligne), assez peu rentable. "L'intérêt n'est pas tant dans la technologie que l'on achète ou les backdoors (porte dérobées dans les logiciels sécurisés, NDLR) que l'on pourrait placer, mais dans le contenu des bases de données", précise notre spécialiste de ce marché. Les listes de fichiers, notamment de clients, sont en effet un enjeu pour le renseignement économique.

Quoi qu'il en soit, la Commission des finances du Sénat nommera prochainement un rapporteur. Il appartiendra ensuite aux présidents de commissions de déterminer si l'enquête parlementaire sur Gemplus doit être ouverte ou non.

Le fait que le Tribunal de commerce ait été saisi le 10 mars 2003 par le comité d'entreprise de Gemplus pour examiner d'éventuelles erreurs de gestion risque de peser sur la décision. En effet, il est fréquent que le Parlement attende la fin des procédures judiciaires avant de se lancer lui-même dans une enquête.

Source: Transfert (29/04/2003)

 

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